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Bienheureux Diego-Joseph de Cadix
Publié le 02/10/2025

Un apôtre pour l'Espagne du XVIIIe s. (1743-1801) - Fêté le 26 mars
Fils d'une illustre famille de la vieille noblesse espagnole, le jeune Joseph-François se distinguait de ses camarades autant par sa piété précoce que par sa nullité scolaire. Malgré tous les efforts d'un brillant précepteur, son intelligence s'avère fermée aux études, sa mémoire incapable de retenir le peu qu'il a compris, et sa langue affligée d'un fort bégaiement. Au collège des dominicains, on le surnomme "l'âne muet", et le recteur profite des vacances du premier trimestre pour le renvoyer définitivement chez lui.
Un saint désir de devenir prédicateur capucin le tenait depuis son plus jeune âge, aussi il se console par de fréquentes visites au couvent d'Ubrique, où il se délecte même en écoutant l'austère psalmodie des offices: "Il me semblait n'avoir jamais entendu musique plus harmonieuse.
A mes oreilles, ce n'était plus un concert humain, mais bien un chœur angélique, et comme un écho des cantiques du ciel". Admis à y servir la Messe, il obtient d'un bon frère la permission d'emprunter quelques vies de saints capucins qui enflamment sa vocation.
A quatorze ans, il demande à être admis dans l'Ordre, mais il est recalé deux fois de suite à l'examen préalable. Son niveau d'études est bien trop faible pour espérer en faire un jour un clerc. Son père est désespéré, que va-t-il faire de son fils ? Dieu permettait cette longue épreuve pour que jamais celui qui sera l'un des plus grands prédicateurs de l'Espagne ne s'attribue la gloire de sa science universelle. En désespoir de cause, on tente un dernier examen, cette fois-ci au couvent de Séville. Il répond correctement, et peut enfin suivre l'appel du Seigneur, qui va maintenant lui communiquer sa Sagesse par étapes.
Cela commence à la vêture: dès qu'il reçoit le saint habit sur les épaules, sa langue se délie, il perd son bégaiement, et devient même le plus distingué lecteur de la Province. Mais ses difficultés pour apprendre demeurent, et durant ses études de philosophie, il se décourage devant son incapacité à saisir les notions scolastiques. Il se console dans la poésie, et comme ses vers sont très appréciés de ses confrères, il s'y adonne avec passion. Dans le même temps, sa ferveur pour la prière et l'observance se relâche ; alors, un saint religieux qui l'observe prie et se mortifie pour lui. Un jour qu'il est repris plus sévèrement par son professeur, la grâce le reprend : il brûle tous ses poèmes et étudie avec une nouvelle ardeur.
Parvenu au traité de Dieu et ses perfections, son intelligence s'illumine, et il acquiert une si grande science sur ces mystères les plus cachés, que l'on décide de l'ordonner prêtre à l'avance, avant la fin de son cours de théologie. Il a 24 ans. On lui confie tout de suite le ministère de la prédication, qui se révèle très fructueux. Cependant, il conservait encore une mauvaise mémoire, et avait du mal à interpréter le sens des Écritures. Il se mit donc à prier et à se mortifier davantage pour obtenir du ciel ce qui lui manquait pour annoncer dignement la Parole de Dieu.
Nous savons, grâce au récit qu'il écrivit lui-même à son Provincial par obéissance, comment son désir fut exaucé de manière extraordinaire. Un jour qu'il priait à cette intention dans une chapelle du couvent consacrée à St lldefonse, ce grand Evêque espagnol (Vll" siècle) lui apparut dans une tempête qui terrorisa tous les religieux, puis lui fit manger un livre mystérieux, comme un ange le fit autrefois pour le prophète Ezéchiel et St Jean l'Évangéliste. A partir de ce jour, le Bx Diego aura toujours le mot convenable sur les lèvres pour expliquer la Sainte Écriture. Il pourra aussi s'adresser à n'importe quel auditoire et lui exposer comme un spécialiste toutes les connaissances nécessaires pour que chacun puisse accomplir le mieux possible son propre devoir d'état.
Les 3000 sermons et les conférences qu'il a laissés par écrit après sa mort nous confirment l'universalité de sa science dans tous les domaines : agriculture, beaux-arts, médecine, économie, politique, art militaire, etc... il possédait parfaitement le droit canonique et civil, connaissait presque parcoeur le texte de la Bible avec ses commentaires de Cornélius et Dom Calmet, ne se trompait jamais d'une date en histoire de l'Église. Une telle érudition lui valut d'être gradué par la plupart des Universités d'Espagne, et d'être même aujourd'hui proposé à Rome pour être déclaré Docteur de l'Église Universelle.
Sa dévotion favorite était le mystère de la Sainte Trinité. Petit enfant, il ne se lassait pas de réciter des "Gloria Patri" devant son image symbolique, et à sept ans, il s'inscrivit à la confrérie de la Sainte Trinité, y recevant le scapulaire qui ne le quittera jamais jusqu'à sa mort. C'est ce même mystère qui avait libéré son intelligence lorsqu'il était étudiant, et lorsqu'il prêchera sur ce sujet, ses sermons de trois heures seront toujours nouveaux et différents, à la grande admiration des théologiens qui savent comment on est vite à court quand il s'agit de traduire cette grande vérité avec nos pauvres mots. Il récitait sans cesse le "Trisagion", cette magnifique louange des Trois Personnes divines, à la manière des anciens Pères du désert, en le labialisant jusque dans son sommeil. Dieu manifestera un jour, durant une mission combien cette dévotion Lui était agréable, en faisant apparaître durant plusieurs heures dans le ciel trois soleils égaux formant un triangle. Comme pour Fatima, ce prodige inouï fut constaté par tous les paroissiens, croyants ou mécréants. C'est encore cette dévotion qui lui faisait administrer le baptême avec une joie indicible, ne refusant jamais les innombrables demandes qui lui étaient faites. Durant les exorcismes préparatoires, il voyait les démons qui s'échappaient du nouveau né, et son visage prenait alors une expression terrible en prononçant les paroles du Rituel.
Mais c'est surtout par le ministère de la prédication que ce "nouveau St Paul" va gagner une multitude d'âmes à Dieu. Les cathédrales ne suffisent plus pour contenir les milliers de fidèles qui accourent plusieurs heures à l'avance pour avoir une place. Le premier sermon donné à la mission de Barcelone a attiré environ 50 000 personnes, selon les estimations des autorités de la ville, qui font annuler la prédication du lendemain, par crainte d'accidents. Pour obtenir le pardon des injures, il prend avec respect la lunule de l'ostensoir dans le tabernacle, et prêche en tenant Jésus-Hostie à bout de bras. Mais sa prédication la plus influente s'adresse aux élites de la nation. Par ses multiples et savantes instructions adressées aux princes, aux gouverneurs, aux magistrats, aux officiers, aux universitaires, il va efficacement contrecarrer dans le Royaume d'Espagne la doctrine pernicieuse des libres-penseurs du "siècle des lumières".
"Apôtre de l'Espagne", ce titre que lui décernent les historiens pour la période critique du XVllle siècle ne semble pas exagéré : comme les disciples de Notre Seigneur, il a lui aussi reçu le don des langues, et des étrangers ne sachant pas un mot d'espagnol témoignent qu'ils ont parfaitement compris ses sermons. Un jour, un enfant s'écrie pendant la prédication : "Oh ! je prêcherais bien, moi aussi : le Père a une colombe qui lui souffle tout à l'oreille !". Si le Saint-Esprit souffle où il veut, il faut reconnaître qu'il a particulièrement agi dans le Bx Diego-Joseph, l'enrichissant de nombreux charismes : dons de prophétie, de pénétration des cœurs, de bilocation, extases, etc... Miracles de la grâce qui couronnaient les effets de sa prédication. Comme !'Evêque de Jaën demandait au Roi d'Espagne de le faire désigner comme son coadjuteur, Charles Ill lui répondit : "Non, ne faisons pas de ce Saint religieux l'évêque d'un diocèse. Laissons-le être l'évêque de toute l'Espagne".
L'apostolat sanctifie, mais est aussi une source de dangers pour un religieux. Hors du cloître et de la vie commune, la pratique de la pauvreté, de la mortification et de l'obéissance devient très difficile, et même héroïque pour un prédicateur comblé d'honneurs. A ses confrères qui lui reprochent de ne pas garder en cellule un reliquaire, don offert par l'archevêque de Tolède, il répond qu'il doit pratiquer les vertus religieuses bien plus parfaitement qu'au noviciat, et qu'alors on ne lui aurait jamais permis une telle entorse à la très haute pauvreté.
La description du cilice qu'il portait nuit et jour fait frémir. Il prenait aussi trois disciplines sanglantes dans la journée : une pour se préparer au Saint-Sacrifice, la deuxième pour les pécheurs qu'il devait convertir.et le soir une dernière pour expier ses propres péchés. S'abstenant de vin et de viande, observant les sept carêmes de St François, il répétait souvent qu'il est très difficile, sans la faim et la soif, de dompter ses passions.
Mais comme la chair reste inférieure à l'esprit, c'est surtout son humilité qui doit exciter notre émulation. Toute sa vie, il conservera présente à l'esprit la conviction de son néant, au souvenir de l'impuissance qui marqua sa jeunesse. Deux ans avant sa mort, il écrivait à son confesseur, entre autres considérations sur sa propre misère : "Je suis sûr que ma vie et mon travail causent des nausées à mon Sauveur Jésus ... Je ne fais rien de ce que je devrais faire…. la dissipation de mon esprit dépasse toute mesure... la crainte de me perdre est continuelle … "
Sa dernière agonie sera cependant très paisible. En l'absence de son Supérieur, dans un dernier acte d'obéissance, il demandera à son compagnon, un simple frère lai, de le bénir et de lui donner la permission de quitter ce monde, au nom du Père Gardien. Il achèvera ainsi son pèlerinage terrestre la veille de !'Annonciation, à Ronda, le célèbre sanctuaire de Notre Dame de la Paix.
Oraison
"O Dieu, qui avez enrichi le Bx Diego-Joseph, votre Confesseur, de la science des saints
et l'avez fait travailler d'une façon merveilleuse au salut de sa nation,
accordez-nous par son intercession, de vivre dans la piété et la justice ;
et de parvenir heureusement au séjour de votre gloire.
Par Jésus-Christ Notre Seigneur… ”
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